CSRD : comprendre la directive européenne et ses enjeux pour la durabilité
Publié le mardi 15 octobre 2024
La directive CSRD ("Corporate Sustainability Reporting Directive") constitue une étape majeure dans la réglementation européenne en matière de durabilité. Adoptée par le Parlement et le Conseil de l'Union Européenne en décembre 2022, elle vient remplacer et étendre la directive NFRD ("Non-Financial Reporting Directive") en renforçant les obligations des entreprises en termes de publication d'informations sur les questions environnementales, sociales, de gouvernance (ESG). Cette directive répond à la volonté de créer un cadre normatif harmonisé à l'échelle européenne, garantissant une transparence accrue des données relatives à la durabilité.
Vérifier mes obligations en 30 secObjectifs et contexte de la directive CSRD
La directive CSRD vise à pallier aux limites de la directive NFRD, notamment en termes de fiabilité des informations divulguées et de comparabilité entre entreprises. L’objectif principal est de contribuer à la transition vers une économie durable en renforçant l’intégration des considérations écologiques et sociales dans la stratégie des entreprises. Conformément au Pacte vert pour l'Europe ("Green Deal"), cette directive vise la neutralité carbone à l'horizon 2050, en améliorant la transparence des entreprises sur leurs actions en faveur de la durabilité.
Adoptée après deux ans de négociations entre la Commission, le Parlement et le Conseil de l’Union Européenne, la CSRD ambitionne de transformer le reporting extra-financier en un véritable outil de gestion de la durabilité. Les entreprises doivent ainsi détailler leur stratégie face aux risques environnementaux, décrire leurs objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et préciser comment leurs activités contribuent à la transition écologique.
Un champ d’application élargi
Contrairement à la directive NFRD, qui ne s’appliquait qu’à environ 12 000 entreprises, la directive CSRD élargit considérablement son champ d’application. Désormais, toutes les grandes entreprises de plus de 250 salariés, réalisant un chiffre d'affaires net supérieur à 50 millions d'euros, ou ayant un total de bilan supérieur à 25 millions d'euros, sont concernées. Les PME cotées, quant à elles, devront se conformer à des exigences simplifiées à partir de 2026. Environ 50 000 entreprises seront ainsi concernées à l’échelle de l’Union Européenne, dont près de 7 000 en France.
De plus, les entreprises non européennes qui génèrent au moins 150 millions d'euros de chiffre d'affaires net dans l'UE devront elles aussi publier des informations relatives à la durabilité, réaffirmant la volonté de l'Union d'imposer ses normes au-delà de ses frontières.
Les exigences de publication de la CSRD
La CSRD impose aux entreprises de détailler leurs actions sur les thématiques ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) selon le principe de la double matérialité
Elles sont structurées selon les domaines d’information suivants :
- Gouvernance (GOV) : les processus, contrôles et procédures utilisés en matière de gouvernance pour contrôler, gérer et surveiller les impacts, les risques et les opportunités
- Stratégie (SBM) : la manière dont la stratégie et le modèle économique de l’entreprise influent sur ses impacts, risques et opportunités matériels, y compris la manière dont l’entreprise gère ces impacts, ces risques et ces opportunités
- Gestion des impacts, des risques et des opportunités (IRO) : les processus à l’aide desquels l’entreprise: i) identifie les impacts, les risques et les opportunités et évalue leur matérialité, ii) gère les enjeux de durabilité matériels au moyen de politiques et d’actions
- Indicateurs et cibles (MT) : la performance de l’entreprise, y compris les cibles qu’elle a fixées et les progrès accomplis dans leur réalisation.
Double matérialité : les matérialités financière et d'impact
La double matérialité comporte deux dimensions :
- La matérialité financière : les impacts des questions de durabilité sur la performance économique de l’entreprise.
- La matérialité d'impact : les impacts des activités de l'entreprise sur l'environnement et la société.
Les entreprises devront donc décrire leur modèle commercial, la résilience de leur stratégie face aux risques climatiques, leurs objectifs de durabilité à long terme, et les actions concrètes mises en place pour y parvenir. Elles devront également se conformer aux normes de durabilité ("ESRS") adoptées par la Commission Européenne, qui fourniront un cadre précis pour la publication des information
Amélioration de la fiabilité et des contrôles
L’un des grands défis de la directive CSRD est d’améliorer la fiabilité des informations publiées. La directive prévoit ainsi l’introduction progressive d’un audit obligatoire pour les rapports de durabilité. Dans un premier temps, ce contrôle prendra la forme d'une "assurance limitée" des données publiées, avant d'évoluer vers une "assurance raisonnable" à partir de 2028. Cela permettra de renforcer la crédibilité de ces informations aux yeux des investisseurs et des autres parties prenantes.
Quel impact pour les entreprises ?
La mise en œuvre de la directive CSRD représente un véritable tournant pour les entreprises. Elles doivent intégrer les questions de durabilité au cœur de leur stratégie et développer des processus internes pour collecter et présenter des informations fiables et vérifiables. La CSRD vise à garantir une plus grande transparence et en établissant des normes claires et comparables pour l’ensemble des entreprises de l’Union.
Pour les entreprises françaises, la CSRD s'intégrera dans un contexte réglementaire déjà instauré, notamment avec la déclaration de performance extra-financière (DPEF). Elle marque cependant une évolution majeure vers une harmonisation européenne et une meilleure comparabilité des données, facilitant ainsi la réorientation des investissements vers des activités plus durables.
Conclusion
La directive CSRD constitue un changement profond dans la manière dont les entreprises rendent compte de leur impact sur la société et l'environnement. En imposant un cadre rigoureux et des exigences de transparence accrues, elle participe à l'ambition européenne de créer une économie plus durable et responsable. Les entreprises doivent se préparer dès maintenant pour se conformer à ces nouvelles obligations et saisir les opportunités liées à la transition écologique.